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Bruits d’un boulodrome : décision de justice en faveur de la commune

Le 23 janvier 2023, le Tribunal administratif de Rennes a donné raison à la commune de Ploemeur, dans un conflit l'opposant aux riverains d’un boulodrome.

boulodrome

Tout commence en 2019, quand un couple de propriétaires contacte la mairie à plusieurs reprises pour contester la décision municipale de déplacer le boulodrome communal à côté de leur maison. Cette demande est rejetée par la commune, considérant qu'il n'y a pas de trouble anormal dans l'existence de ce boulodrome à proximité des habitations. N'obtenant pas satisfaction, les riverains demandent au Tribunal administratif d'annuler ce rejet. En décembre, les riverains réclament devant le Tribunal administratif la réparation des préjudices subis, soit le versement d’environ 86 000 euros (dont 40 000 euros au titre des nuisances sonores), la condamnation de l'un des accès au boulodrome et le déplacement du boulodrome sur une autre parcelle afin de rétablir le sentier côtier.

Des conversations, des boules qui tapent et par moment des cris

Pour ce couple de bretons, des constats d'huissiers le prouvent : le boulodrome génère des bruits de conversations et de boules qui tapent, et « par moment des cris ». Pour eux, la responsabilité de la commune doit être engagée sur deux tableaux :

  • la responsabilité sans faute résultant de dommages permanents de travaux publics, du fait de la présence du boulodrome à côté de leur maison d'habitation ;
  • la responsabilité pour faute, au titre des carences du maire dans l'exercice de ses pouvoirs de police.

Le boulodrome sans danger pour l’ordre public

Le maire doit s'assurer que l'existence ou le fonctionnement des ouvrages publics (comme le boulodrome) ne génèrent pas de trouble sonore ou esthétique. Il est également responsable des nuisances générées par les travaux publics. Cette responsabilité peut être reconnue même sans faute. Cela signifie que les requérants ne sont pas tenus de démontrer la gravité du préjudice. Par ailleurs, le maire est garant de la tranquillité publique de ses administrés. En s'abstenant d'agir, le maire ne remplit pas ses obligations induites par l'exercice de ses pouvoirs de police (article L2212-1 du Code général des collectivités territoriales).

Dans l’affaire du boulodrome, les preuves apportées par les requérants, des constats d'huissiers et des coupures de presse, ne sont pas suffisantes pour caractériser l'existence d'une situation particulièrement dangereuse pour l'ordre public. Si le juge reconnait que le boulodrome génère des nuisances sonores, celles-ci ne sont que modérées. Il n’y a donc pas de carence du maire dans l’exercice de ses pouvoirs de police. La responsabilité pour faute de la commune n'est donc pas retenue.

Concernant les indemnités demandées, les nuisances sonores n'étant que modérées, le préjudice n’est ni grave, ni spécial. De tels inconvénients n'excèdent pas ceux que doivent normalement supporter sans indemnité, dans l'intérêt général, les voisins d'ouvrages affectés à un service public.

Pétanque et carence du maire

Ce n'est pas la première fois que l'exercice des pouvoirs de police du maire est contesté dans une affaire de terrain de pétanque. A Arès, un couple de propriétaires avait demandé la condamnation de la commune du fait de la carence du maire dans la mise en oeuvre de ses pouvoirs de police. Pour assurer leur tranquillité, le maire avait demandé aux agents de la police municipale de vérifier régulièrement le respect de cette inetrdiction (ce qui avait été fait), et avait prescrit la mise en place d'un dispositif destiné à atténuer le bruit des boules sur les rondins de bois entourant le boulodrome. Enfin, le maire avait pris un arrêté municipal pour restreindre l'activité de pétanque après 20 heures et interdire les regroupements excessifs de personnes. Lors de l'enquête, une étude acoustique avait démontré qu'aucune émergence sonore ne justifiait la réalisation de travaux de réduction du bruit. La carence du maire n'avait donc pas été retenue (Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 12 avril 2019, 17BX02499,17BX02500).
Dans une affaire de 2007, la commune avait soutenu, sans être contredite par les juges, que les comportements d'ordre privé des personnes stationnant à proximité du boulodrome n'étaient pas connus antérieurement aux opérations d'expertise, et que les riverains requêrants ne soutenaient pas que cette nuisance aurait perduré postérieurement. A ce titre, les juges n'avaient pas retenu la responsabilité de la commune du fait de l'exercice des pouvoirs de police municipale (Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 13 février 2007, 04BX00662).

Tribunal administratif de Rennes, 6ème chambre, 22 décembre 2022, n° 2002241

Une question sur le bruit ?