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Les dark kitchens et dark stores ont désormais un cadre juridique

Les dark stores sont désormais juridiquement qualifiés d'entrepôts. Les communes pourront donc s'opposer à leur implantation en cas de non-respect des règles d'urbanisme. Les dark kitchens (avec préparation des repas) sont quant à elles réglementées par un statut particulier.

dark storeUn décret et un arrêté ont été publiés au JO du 24 mars dernier pour poser le cadre juridique de ces deux types de nouvelles activités, en plein essort depuis la crise sanitaire. Le décret définit la « cuisine dédiée à la vente en ligne » (soit les dark kitchens, avec préparation des repas) comme une activité qui entre désormais dans la destination des « autres activités des secteurs primaire, secondaire et tertiaire » du Code de l'urbanisme (article R151-27). A ce titre, ces activités peuvent désormais être réglementées par les Plans Locaux d'Urbanisme (PLU) ou les documents en tenant lieu, au même titre que les locaux de bureaux, les industries ou encore les lieux de restauration. L'arrêté vient en donner une définition : la « cuisine dédiée à la vente en ligne » recouvre les constructions destinées à la préparation de repas commandés par voie télématique. Ces commandes sont soit livrées au client soit récupérées sur place.

Concernant les dark stores, ces magasins de colis à livrer, ils entrent désormais dans la catégorie des entrepôts, et non pas des commerces, comme le voudraient les différentes sociétés exploitantes de ces lieux. Les entrepôts sont ainsi définis par l'arrêté comme recouvrant les constructions destinées à la logistique, au stockage ou à l'entreposage des biens sans surface de vente, les points permanents de livraison ou de livraison et de retrait d'achats au détail commandés par voie télématique, ainsi que les locaux hébergeant les centres de données.

Les maires aux commandes

Les dark stores, même s'ils prévoient des points de retraits, sont requalifiés en entrepôts logistiques. La transformation de locaux commerciaux en dark stores constitue donc un changement de destination. Cela signifie que si le Plan Local d'Urbanisme (PLU) de la commune interdit ce type d'activité, l'établissement pourra être contraint de fermer.

Les dark kitchens sont désormais reconnus juridiquement dans le Code de l'urbanisme. Les exploitants souhaitant transformer un commerce en dark kitchen devront en avoir l'autorisation administrative de la mairie (demande de changement de destination au titre de l'article R151-27 du Code de l'urbanisme). La commune pourra refuser ce changement de destination en application du PLU.

Le brouillard se dissipe

Ces lieux ayant explosé depuis les périodes de confinement, il a fallu faire face à de nombreuses interrogations autour de la légalité de leur implantation. Exploitants et communes se sont d'ailleurs retrouvé plusieurs fois devant la justice. Les communes se trouvaient démunies face à l'absence de réglementation claire autour de l'exploitation de ces lieux, souvent décrits comme particulièrement bruyants du fait des allers et venues des deux-roues motorisés. En 2022, le Gouvernement et les maires de grandes villes françaises s'étaient positionnés sur la qualification des dark stores en entrepôts afin que ces activités puissent au moins être encadrées par les règles urbanistiques. Puis, dans une affaire de 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Paris avait pris le contre-pied de la position de l'executif en reconnaissant l'interêt collectif des dark stores et donné raison aux exploitants de ces cuisines. Le juge avait toutefois insisté sur la nécessité de donner une qualification juridique à ces lieux (relire notre article Dark-stores, ces activités dans le viseur).

Finalement, le Conseil d'État s'est positionné en mars 2023 (Conseil d'État, ordonnance, 23 mars 2023, n°468360) : les dark stores ne relèvent pas de la catégorie « constructions et installations nécessaires aux services publics ou d’intérêt collectif » dans le PLU de Paris, contrairement à ce qu’avait jugé le tribunal administratif. En l'espèce, il s'agissait du recours de deux sociétés de dark kitchens qui contestaient que la mairie s'était opposée à leur installation. La mairie avait demandé à ce qu'elles restituent les locaux à leur activité d'origine, les entrepôts étant interdits en rez-de-chaussée sur rue à Paris. Pour s'installer, ces sociétés auraient du déposer une déclaration auprès de la mairie de Paris pour utiliser les locaux comme dark stores, alors qu'ils hebergaient traditionnellement les commerces classiques de la ville : « la mairie de Paris peut légalement ordonner aux sociétés de livraison rapide le retour de ces locaux aux activités initiales de commerce traditionnel, dès lors qu’il y a eu un changement d’activité non autorisé. »

Le lendemain, sont publiés au Journal Officiel le décret et l'arrêté :

 Depuis, la ville de Paris a contesté l'implantation de plus de 25 dark stores après leur requalification en entrepôts ! Tout nouveau dossier fera l’objet d’une instruction immédiate par l’administration.

Une question sur le bruit ?