Quiet Drones 2020 est le tout premier congrès international consacré au bruit produit par les drones et les aéronefs à décollage et atterrissage vertical. Cet événement organisé par INCE-Europe et le CidB s’est tenu à distance (vidéoconférence depuis Paris) les 19, 20 et 21 octobre 2020. Ce congrès a réuni 170 participants autour de la question de la maîtrise de l’empreinte sonore des drones.
Le bruit des drones est un petit sujet. De fait, qui à ce jour se plaint vraiment du bruit des drones ? La grande affaire actuelle, en matière de drones, c’est leur acceptabilité et leur sécurité. Quelles sont les conditions qui feront que l’on accepte de voir le ciel se remplir d’engins volants autonomes ? Quelles garanties a-t-on de na pas recevoir un drone sur la tête ? Mais lorsque ces questions d’acceptabilité et de sécurité auront été réglées, il restera une problématique qui risque de freiner le développement des drones : leur empreinte sonore. Le nombre des engins professionnels a littéralement explosé et est maintenant très supérieur à celui des avions conventionnels. D’ici peu, ces engins vont se généraliser dans des secteurs comme l’agriculture, la surveillance des réseaux et la logistique des livraisons. Si le nombre d’engins augmente, les nuisances sonores auront vite fait de poser les limites au développement de ces nouvelles technologies. Le bruit de ces engins constitue déjà une préoccupation importante dans les zones résidentielles et les environnements sensibles comme les parcs nationaux. C’est la raison pour laquelle Ince-Europe et le CidB ont souhaité dresser un panorama du bruit des véhicules autonomes sous tous ses aspects, avec un périmètre allant des plus petits appareils qui ne pèsent que quelques centaines de grammes jusqu’aux taxis volants pouvant embarquer plusieurs personnes à leur bord.
Au total, ce congrès a réuni 170 experts du bruit issus des universités, de l'industrie et des agences gouvernementales pour identifier, discuter et traiter du problème du bruit des drones. Une cinquantaine d’interventions ont été présentées lors d'une série de conférences techniques réparties sur les trois jours. Le nombre de nationalités représentées au sein des intervenants — 25 pays, au premier rang desquels figurent les USA, la France, l’Allemagne, le Japon, le Royaume-Uni, la Chine et l’Australie — suffit à évaluer le caractère éminemment international de ce sujet.
Première bonne nouvelle, le format en distanciel choisi pour ce congrès a fait preuve d'une efficacité très satisfaisante. Il avait été demandé aux 50 intervenants d’enregistrer leur présentation sous forme de vidéo. Un surcroit de travail pour eux, mais qui s’est avéré payant : moins d’imprévus, donc un temps de parole scrupuleusement respecté, laissant une large part — une heure ! — à la discussion. Or, la tribune virtuelle où étaient réunis les intervenants, bien que ceux-ci s’expriment des quatre coins du monde, est en pratique propice à une grande interactivité entre experts. Par exemple, il suffisait d’un clic pour faire « monter » un participant à la tribune, afin que celle-ci ou celui-ci se joigne au débat. Bien sûr, tous ont regretté de ne pouvoir prolonger ces discussions autour d’un café une fois les conférences terminées. Pour atténuer cette frustration, plusieurs conversations plus informelles, sous formes de réunions virtuelles, ont été programmées entre les conférences.
La question de la certification acoustique des engins a occupé une bonne partie des débats. De fait, qu’il s’agisse des petits appareils tels que les drones ou des plus gros comme les taxis volants, les industriels ont besoin de connaître la règle du jeu. Les autorités de réglementation, qu’elles soient internationales ou nationales, ont quant à elles besoin d’un référentiel pour savoir comment encadrer l’intégration environnementale de cette nouvelle source de nuisances. Le problème, c’est que sur ce sujet des normes et des procédures d’évaluation, on est face à une situation qui relève de l’œuf et de la poule : les pouvoirs publics ont besoin de données pertinentes pour les aider à comprendre la conception des véhicules, les caractéristiques sonores, les modes de fonctionnement, etc. Des données que les industriels ne sont pas forcément prêts à rendre publiques, car ayant nécessité de coûteux investissements en recherche et développement. On le voit, une collaboration entre les politiques et les industriels, dans le cadre de comités techniques, s’impose.
Concernant les indicateurs de certification acoustique, au moins dans un premier temps, peut-être faut-il s’inspirer de ce qui s’est fait au siècle dernier pour d’autres matériels bruyants, tels que les tondeuses à gazon. C’est-à-dire commencer humblement, en choisissant des indicateurs acoustiques certes imparfaits, mais compatibles avec des protocoles d’essais reproductibles, tels que la puissance acoustique. Par la suite, il conviendra bien sûr de poursuivre le développement d’indicateurs et de modèles prédictifs de la gêne afin de mieux éclairer la prise de décision des constructeurs de véhicules et des autorités de réglementation.
Sur le sujet des outils de mesure, d'analyse et de prévision, différentes techniques de localisation des sources sonores (caméra acoustique, vibrométrie laser) ont été présentées. Du côté des modèles de prévision, les différentes méthodes, expérimentales ou numériques, qui ont été présentées, reflètent la grande vitalité de la recherche en la matière. Les méthodes de réduction du bruit des systèmes de propulsion ont elles aussi démontré la grande diversité des approches en la matière. Pour couvrir ce vaste sujet, deux conférences de deux heures ont été nécessaires : elles ont abordé les techniques de réduction du bruit des hélices, dont certaines font appel au bio-mimétisme, la question de l’interaction entre hélices et celle de l’interaction entre hélices, carénage et structure. Mais ce seul travail sur le niveau de bruit ne suffira pas, il faudra aussi améliorer la signature acoustique de ces engins, que bon nombre de spécialistes dénoncent comme jouant un grand rôle dans la gêne ressentie.
Les actes de ce colloque sont disponibles au tarif de 100 euros (cf. site www.quietdrones.org - La fonctionnalité de paiement sera disponible à partir du 1er novembre 2020)
Quiet Drones 2020 – L'impact sonore des drones, un enjeu pour la ville de demain ? 19-21 octobre 2020 - Télécharger le livret du colloque (programme, résumés des présentations, en anglais) - Format pdf - 7,9 Mo